He's like your worst nightmare ! UC

James ne pouvait croire ce qui se déroulait devant ses yeux. Cette scène, ces paroles qu’ils se jetaient à la figure depuis qu’il était rentré, cela ne pouvait pas être eux. Ce ne pouvait pas être Emeraude qui sous-entendait qu’elle le quitterait s’il n’arrêtait pas. Ce n’était pas possible. James devait être en plein cauchemar. Cela ne pouvait être que ça : sinon, comment pourrait-elle envisager de le quitter ? Comment pouvait-elle ne serait-ce que penser à jeter leur histoire aux orties ? James refusait d’en croire ses yeux et ses oreilles. Dans un dernier sursaut, il tenta de tout son être de croire que tout cela n’était que mirage, une folle illusion, un mauvais rêve. Mais il ne pouvait se persuader aussi facilement. Il ne voulait même pas croire en un leurre, qui le protégerait de la douleur qui le submergeait. Après tout, c’était entièrement sa faute et il en avait douloureusement conscience. Bien qu’il ne puisse accepter qu’Emeraude cesse de se battre pour sauver leur amour, leur trésor, le plus cadeau que James ai jamais reçu, il ne pouvait refuser l’évidence que tout était de sa faute. Il admettait qu’il était allé trop loin. Bien trop loin. Emeraude avait été conciliante, avait su accepter l’inacceptable, là où toutes les autres femmes auraient refusé tout compromis. James aurait du ressentir de la gratitude, un amour inconditionnel pour sa femme. Mais il avait peur. Peur d’abandonner ses liaisons extra-conjuguales. Peur de ne pas en être capable. Peur de décevoir Emeraude. Et s’il acceptait de rompre toutes ses liaisons, et n’y arrivait pas ? Qu’est-ce qui se passerait alors ? Parce que James savait que c’était ce qui se produirait, ou tout du moins, il le redoutait tellement que cette hypothèse s’était transformée en fatalité dans son esprit. La question la plus terrible qui courrait dans son esprit, ravageant tout reste de confiance et de calme était : Emeraude s’en irait-elle définitivement lorsqu’elle comprendrait que même s’il le voulait de toutes ses forces, il ne pouvait rester fidèle ? Et savait-elle que même s’il lui était infidèle, son cœur serait toujours loyal à sa personne ? Devait-il lui dire ? Il allait ouvrir la bouche, lui préciser cela, quand il changea d’avis. L’information avait déjà quitté son cerveau et donc, le temps de modifier la directive ; il entrouvrit la bouche avant de la refermer rapidement. En effet, elle le savait déjà, sans aucun doute – selon James. Elle le savait et c’était certainement ça qui l’avait fait tenir si longtemps à ses côtés. Face à cette réalité, il décida, avec toute la douleur du monde, d’essayer de comprendre Emeraude. Lui-même n’aurait jamais pu tenir si longtemps, lui-même n’aurait pu accepter une seule de ses infidélités. Intransigeant, il l’aurait certainement quittée. Il aurait souffert plus qu’à n’importe quel moment de sa vie, peut-être même plus que quand il avait du supporter la vision de sa mère, frappée à de très, très nombreuses reprises par son père. Et il serait certainement parti la supplier de le reprendre, mais, rien qu’imaginer le postulat de l’infidélité d’Emeraude, était une souffrance colossal, une plaie béante hurlant son mal, comme à l’agonie. Il ne l’aurait pas supporté, l’évidence était là, en lui. Et ce fut seulement à ce moment-là, quand il eut imaginé la douleur que cela lui aurait causé si les rôles avaient été inversés, qu’il compris l’ampleur du mal qu’il avait causé à sa belle Emeraude, l’amour unique de sa vie. Il releva alors ses yeux, et son regard exprimait une horreur sans nom.
Elle s’approcha alors de lui, franchissant la distance qui les séparait et qui causait tant de douleur au pauvre James. Il avait l’affreuse impression d’être dangereux, et qu’Emeraude gardait ses distances puisqu’elle avait peur de lui. Ce rapprochement fut donc un miracle, une nouvelle bouffée d’oxygène pour le jeune Dieu. Mais il fut aussi la source d’une envie presque incontrôlable de prendre sa femme dans ses bras, de la serrer si fort contre son torse pour ne plus jamais la laisser repartir. Il ne voulait pas la quitter, il n’accepterait jamais la fin de leur histoire, mais l’angoisse qu’aujourd’hui ils en soient arrivés au terme le tenaillait. Et si c’était réellement le cas ? Il voulait alors profiter une dernière fois de celle qu’il aimait. Et il ne pensait en aucun cas sur le plan sexuel, dans l’esprit de James l’amour et le sexe avaient toujours été clairement distinct et c’était cela même qui lui permettait d’entretenir ses liaisons. Non, il voulait simplement être avec elle, pouvoir goûter à nouveau à la douceur de ses lèvres, entendre le son agréable de sa voix, retrouver l’amour intense dans ses regards. Toutes les choses qui ne semblaient plus exister en cet instant. Et il restait là, concentré à rester digne, à ne pas commettre une nouvelle erreur, à ne pas s’énerver à nouveau. Ses bras étaient collés le long de son corps, pour ne pas qu’ils tentent de saisir la taille finement dessiné d’Emeraude. Ses yeux restaient plongés dans la profondeur du regard de celle qu’il avait épousé, cinquante ans plus tôt. C’est à cet instant qu’elle commença à parler. Elle avait pris son temps pour répondre à l’injonction de James. Elle reprit leur mariage comme bouclier, comme venait de le faire James. Mais cette fois, c’était elle qui avait raison. Il le savait. Il avait trahi ses vœux après à peine quelques jours de mariage, et avait continué ainsi jusqu’à cette nuit. « Voulez-vous prendre cette femme pour épouse légitime, et vivre avec elle, dans le saint état du mariage? L’aimerez-vous, la consolerez-vous, l'honorerez-vous, dans la maladie, comme dans la santé, et renonçant à toute autre union, lui resterez-vous fidèle jusqu'à la mort ? » Cela avait été les mots exactes du prêtre qui les avaient unis. James s’en rappelait parfaitement, comme il se rappelait de chaque moment qu’il avait passé avec sa femme par la suite comme auparavant. Il n’avait pas hésité une seconde et avait répondu précipitamment « Oui, je le veux. » d’une voix solennel et forte. Il s’y était engagé, il devait tenir sa parole. Et puis il y avait eu la suite, ses vœux. Il s’était approché tout près d’elle, avec énormément de tendresse et l’amour transpirant de tous ces pores, et lui avait murmuré ces mots qu’il avait adorablement appris par cœur au préalable afin de ne pas être forcé de simplement les répéter après l’homme de l’office. Ces mots-là, à l’époque, avaient effleuré de tendresse l’oreille d’Emeraude et elle avait sourit, d’un sourire éclatant de bonheur. « Moi, James Caldwell, déclare te prendre, toi, Emeraude, pour épouse légitime, à partir de ce jour, pour le meilleur et pour le pire, dans la richesse et dans la pauvreté, dans la santé et dans la maladie, pour t'aimer et te chérir jusqu'à ce que la mort nous sépare, selon le décret de Dieu, et je t'en donne ici ma foi. » Ces mots-là avaient franchi la barrière de ses propres lèvres, il ne pouvait aujourd’hui les renier. Il y avait cru, quand il avait dit cela, il ne se serait jamais figuré devenir un jour celui qui rendrait malheureuse celle qu’il épousait.

Il tourna alors la tête, déportant son regard vers la droite, suivant celui d’Emeraude. Et là, il vit. Il vit ce qu’il avait toujours redouté, et redoutait encore aujourd’hui. Il allait renoncer, tout abandonner, faire le plus gros sacrifice de toute sa vie. Il était prêt, une seconde auparavant, à tout quitter, tout abandonner seulement pour la garder à ses côtés. Il allait lui faire l’offrande la plus dévouée qu’il n’avait jamais exécuté. Il était prêt à faire cette promesse, et il avait senti qu’il ne le regretterait pas. Qu’il en souffrirait certainement à chaque instant mais que jamais il ne pourrait le regretter. Mais elle semblait déjà avoir décidé de s’en aller. Elle semblait avoir déjà pris sa décision, sans attendre après ce que James pourrait lui dire. Il eut l’impression d’avoir été assommé par une massue. La douleur se propagea à nouveau dans tout son être ; il avait terriblement mal, plus que jamais. Il tourna son regard torturé et souffrant en direction de son visage, mais elle pu déjà déceler dans celui-ci une allure fiévreuse. James était terriblement en colère contre elle. Elle venait de le trahir de la pire manière qui soit, bien pire que toutes les fois où James n’était pas rentré de la nuit. Il s’éloigna d’elle et s’approcha de ce sac posé dans l’entrée. Serait-elle partie sans rien dire s’il n’était pas arrivé à ce moment-là ? Il ouvrit frénétiquement le sac, manquant de casser la fermeture éclair. Avec douleur, il y trouva quelques vêtements. Il n’y vit ni la photo ni son parfum. Il jeta le sac à travers la pièce et se retourna face à sa femme. Il essayait de contenir sa colère, mais bouillonnait. Il fixa sur elle un regard accusateur. Elle avait noué ses cheveux en une couette haute et le regard de James dérapa sur ce cou, sur ces clavicules qu’il aimait tant. Il avait envie d’hurler, de tout casser, de se déchaîner afin d’évacuer l’immense souffrance insinuée dans son être. Au lieu de ça, il approcha à grand pas d’Emeraude et la plaqua contre le mur. Là, il l’embrassa avec force, une force pleine de désespoir.